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Guerre 1914 / 1918 - Le 407° R.I.
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31 mars 2009

Marcel ARVISENET (5)

- PRELEMINAIRES D’ATTAQUE. -

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Enfin on commence à en parler, de cette fameuse attaque ! On en parle pour le 25 Septembre. Il n’y a plus guère de jours ! aussi, le cœur bat un peu plus fort sous la capote bleue ! Quand, le 22 septembre, le Général FOCH, Commandant en chef les Armées du Nord-Ouest, vient nous passer en revue, nous savons à quoi nous tenir !        Il nous annonce froidement que  le 407 aura l’honneur de charger à la baïonnette, un des premiers, et qu’il espère voir flotter bientôt son drapeau sur les hauteurs de Vimy, et de Douai.  Il ajoute : " Beaucoup de vous, soldats du 407, jalonneront la route de la victoire, mais avant de mourir, vous verrez la défaite de l’ennemi ! Du courage ! et Haut les cœurs !! "

Oui, comme nous a dit le Général FOCH, combien d’entre nous tomberont au Champ d’honneur, Dieu, seul, le sait ! Peut-être que je serai de ceux-là !… Mais nous aurons le temps d’y penser en partant à l’assaut !

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25 Septembre 1915, midi.                   Penin, le petit village d’Artois, est en rumeur. Les sections défilent, les unes derrière les autres, au bureau de la Compagnie, pour toucher les casques. Nous abandonnons le vieux képi bleu horizon, pour cette nouvelle coiffure, qui doit protéger notre crâne contre les balles, et les éclats d’obus.

Des camions défilent sans arrêts chargés de troupes qui montent en lignes pour l’attaque. Des régiments de cavalerie traversent le village, et se dirigent vers le Mont St Eloi. Dragons avec la lance ; Hussards et Chasseurs. La cavalerie a donc l’intention de prendre part à l’attaque ? Ce n’est guère possible. Nous touchons des masques contre les gaz. Il paraît que l’ennemi emploie beaucoup  les gaz asphyxiants ! ce qui n’a rien de bien rassurant ! On nous distribue 80 cartouches supplémentaires, ce qui porte notre approvisionnement à 200 cartouches. C’est un poids qui se fait sentir sur les reins, et dans la musette ! Nous recevons des vivres de réserve, et l’ordre arrive de faire les paquetages. Nous partons cette nuit.

            Notre artillerie fait rage, et les bois d’Ecoivres et de Bray disparaissent  sous la fumée des obus de gros calibres, que l’ennemi envoie pour combattre nos pièces.

            La nuit arrive ; nous partons en colonne par deux pour ne pas encombrer la route, car les caissons d’artillerie défilent sans cesse, nous éclaboussant d’eau et de boue.

Le 3ème bataillon passe la nuit au moulin d’Ecoivres où nous sommes empilés comme des harengs.

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            Nous déambulons dans les boyaux du Mont St Eloi, dans la boue jusqu’aux genoux ! A cinquante mètres de nous, une batterie de 75 tire sans arrêt. C’est un vacarme assourdissant ! Nous avons été alertés au moulin d’Ecoivres, et en plein milieu de la nuit, nous sommes partis, sans rien dans le ventre ! Ce n’est que le début de nos misères, aussi nous ne disons pas grand chose, exténués de fatigue et abrutis par le bombardement.

            Nous retournons au moulin d’Ecoivres, où nous passons le reste de la matinée. Le village est sens dessus dessous ! des cavaliers galopent dans tous les sens ; des autos vont dans la direction de Bray, chargées de troupes ; des échelons de munitions. Tout cela circule avec un bruit de ferraille, en soulevant des gerbes de boue.

           La clameur du canon grandit d’heure en heure ; les décharges et les explosions se confondent en un roulement continuel.

            Le soleil baisse, la nuit descend. Bientôt, les avions ne distingueront plus les tranchées sur le sol.

Là-bas le bruit du canon redouble !

Rassemblement ; les bataillons sont là, tous rassemblés. Les officiers font l’appel de leurs unités. Il n’y a aucun manquant ; quelques hommes sont ivres, mais qu’importe !…

Un coup de sifflet annonce le départ et le Régiment se dirige vers les premières lignes.

            L’ombre du soir étend son voile sur le Champ de bataille ; le brouillard épais, est déchiré à tout instant par les éclairs de l’artillerie. Nous sommes à l’entrée du boyau des Cavaliers, au bois de Mont St Eloi.

            Un bruit infernal emplit nos oreilles ; c’est un grondement épouvantable….. des canons tirent partout…. Bientôt, nous dépassons la zone de l’artillerie lourde. Nous entendons  les gros obus filer très haut au dessus de nous, avec des bruits de chemin de fer.

            Les trois obusiers de 270 mm tirent sur le bois de la folie ; c’est un vacarme à devenir fou !

            Nous devons approcher de Berthonval, car nous entendons le claquement sec des 75, et, par instants, le vent nous apporte des crépitements de mitrailleuse.

            Vers minuit, nous faisons halte dans un boyau  à cent mètre d’une batterie de 75.Assis dans la boue, nous nous endormons, au son du canon et à la lueur des fusées, et du tir d’artillerie.

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Je passe sous silence la montée en ligne, qui dura trois jours, pour faire 1500 mètres ! et fut, non seulement un martyre, mais une montée au calvaire !!

Et je reprends mon journal au jour de l’attaque.

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28 Septembre 1915.               Nous avons dormi, cette nuit, dans le boyau des pylônes. Réveillés de bonne heure par le bombardement, nous nettoyons nos armes avec de l’huile de sardines !… Il a plus toute la nuit ; aussi la tranchée est-elle un véritable mortier ! Nos uniformes sont des paquets de boue. Et nos visages ?…Affreux !!

            Notre artillerie redouble d’énergie, quand ,soudain, un ordre arrive :  " Sacs au dos ! "  - Le sous-lieutenant CESSEY passe au milieu de nous, et nous encourage, comme l'aumônier exhorte un condamné à mort avant le supplice!  A! nous savons bien, mon lieutenant, que c'est pour cet après-midi, et cette nuit, peut-être notre dernière, nous n'avons guère dormi! Il est vrai que depuis le 24, le 119ème R.I. a attaqué et nous devions servir de renforts. Le Sergent-fourrier Parizet, et l'Adjudant Mairet, ont été blessés assez grièvement. – A trois heures,, l'attaque a eu lieu, mais le 119èmen'a pas réussi à prendre  la première ligne ennemie.

             Le 25 Septembre, le 1er Bataillon du 407 a attaqué à six heures du matin; mais les mitrailleuses ennemies ont fauché les escouades, à mesure qu'elles sortaient des parallèles de départ!

          Le 26 et le 27, l'attaque a continué. Plusieurs régiments ont attaqué, sans aucun résultat. Aussi, il parait que c'est notre tour d'entrer dans la danse !!

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