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Guerre 1914 / 1918 - Le 407° R.I.
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18 juin 2009

L'ASSAUT SUPREME (11)

L'ASSAUT SUPREME.

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L'ordre vient d'arriver de repartir en avant. Il faut parvenir à prendre pieddans le Bois de la Folie. L'attaque se déclenche sur notre droite. Le soir tombe, mais le temps est

d'une grande visibilité! Tous les points du Champs de bataille se couvrent d'une nuée de soldats qui semblent surgir de terre, et foncent sur un ennemi invisible, qui couvre la vague

d'assaut d'une pluie de balles.

            Une batterie allemande de 105mm est en lisière de la Folie, et les pièces débouchent à zéro. Les obus nous éclatent sur la tête, avant le bruit du départ. Un hurlement se fait entendre… Par bonds, la vague d'assaut arrive près du but, et c'est à qui hurlera le plus fort! Cris de douleur… cris de rage… et cris de victoire…

            Une compagnie allemande surgit à cent mètres. Combien sont-ils? Cent? Deux cents? Peu importe! Un officier du 1er bataillon désigne l"ennemi de son bâton, et sa voix résonne au milieu des éclatements: " Poilus du 407! Encore un peu de courage, et la Folie est à nous!! A la baïonnette! Et pas de pitié! "

            Le choc a lieu trente secondes après. Mais, comme l'ennemi a, sur nous, l'avantage du nombre, du terrain et du commandement, nous reculons de trente mètres. Bientôt, la lutte à l'arme blanche s'engage! Il se produit des corps à corps au couteau… Des blessés, couchés au fond des boyaux, nous tirent dans le dos. Il faut en finir… quelques hommes ramassent des pelles-bêches, et fendent les têtes des blessés ennemis… les pelles coupent les mains; et fendent les crânes…

            L'ennemi recule, pressé par nos baïonnettes! Nous arrivons sur la tranchée de cinquième ligne. Une explosion terrible me renverse, ainsi que plusieurs camarades… Nous nous secouons, et, avec des rugissements, nous sautons dans la tranchée.

            Au milieu de la fumée, j'entrevois mes camarades fonçant, baïonnette en avant, dans le trou d'où les boches tirent sur nous, à bout portant. Puis plus rien… On sent que c'est la fin! L'ennemi nous abandonne sa tranchée…

            Je repars en avant, à sa poursuite, entraîné par une Compagnie du 24ème R.I.; avec plusieurs de mes camarades, nous arrivons à cinquante mètre du Bois, et harcelés par le tir des mitrailleuses, nous nous couchons dans la boue, en tirailleurs.

BECKER Jacques est à ma droite, et VUILMAU à ma gauche; nous tirons sur des silhouettes que nous apercevons devant nous. La nuit, à présent, est tombée! Le canon est calmé… Alentour, le râle des mourants… A un certain moments, j'appelle BECKER pour avoir des cartouches; il ne répond pas! Le pauvre garçon est mort, frappé d'une balle en plein front… A gauche, VUILMAU a la figure dans la boue et repose dans une flaque de sang… Epouvanté, je recule lentement jusqu'à un trou d'obus, où j'attends que les rafales de mitrailleuse s'arrêtent. Je me  retrouve avec Gaillard, Caporal à la 1ère section. Nous retrouvons nos camarades du 407 en pleine action! On se bat encore sur certain points… Le Lieutenant GERAR-DUBOT insulte l'ennemi, et lui lance des grenades .Dans la tranchée, on foule des corps mous, dont quelques-uns remuent… Des cadavres sont entassés, en long et en travers, sur des blessés qui gémissent et réclament les brancardiers!

            Nous passons la nuit sous la pluie, couchés dans la boue, nettoyant nos fusils, en prévision d'une contre-attaque de l'ennemi, qui heureusement, est aussi fatigué que nous!!

            VAGNEZ, de la 5ème escouade, est parti depuis cinq heures du soir porter un pli, et n'est pas revenu, tué dans le bled… TISSERAND et GRANGJEAN ont disparu… Encore trois bourguignons de moins! Pendant toute la nuit, nous creusons la tranchée, et retournons les créneaux du côté de l'ennemi. Tout est calme, mais dans la plaine, on entends les plaintes des blessés… Ici, on appelle les brancardiers. Là on demande à boire… Plus loin, un mourant réclame sa Mère… Ce soir de bataille est bien triste!! Combien de camarades sont tombés dans la plaine de Vimy? Je l'ignore! A ma section, nous restons 8 sur 48……

          Le soleil se lève lentement. La nuit est finie. La bataille va peut-être reprendre de nouveau. Une mitrailleuse ennemie tire sur des renforts qui nous arrivent. – On demeure là… Les vivants ont cessé de se battre, et les mourants achèvent de mourir… L'exaltation est apaisée; il ne reste plus que la fatigue, et l'attente qui recommence… De quoi cette journée sera t elle faite? Nous ne le savons pas! Est-ce notre dernier jour de souffrance? Nous le souhaitons!

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